Yamashita Rin (1857-1939) la fille d’un samouraï, convertie à l’Orthodoxie et devenue une célèbre peintre d’icônes.

Plusieurs années après la Révolution d’Octobre 1917, le personnel de l’Ermitage a découvert une icône inhabituelle,  » La Résurrection du Christ « , dans les réserves du Musée. Il faisait partie des objets personnels de l’empereur Nicolas II. Il s’est avéré que cette icône avait été présentée à l’ empereur lors de son voyage au Japon. Elle a  été peinte par la première iconographe  japonaise Yamashita Rin. L’archevêque Nicolas (Kasatkin) 1836 – 1912, fondateur de la mission orthodoxe russe au Japon, a appelé la japonaise Yamashita « Notre Irina Petrovna » (son nom de baptême était  Irina). Mgr Nicolas fut son père spirituel jusqu’à la fin de sa vie. La jeune femme avait un caractère difficile, elle était une digne fille de son père samouraï: fière, indépendante  et déterminée. Née en 1857 dans la ville de Kasama. On sait qu’à l’âge de 15 ans, après la mort de son père, elle s’est enfuie de chez elle à Tokyo pour étudier la peinture. Elle est admise dans la première classe d’étudiantes de la la toute première université d’art du Japon, Kôbu Bijutsu Gakkô. L’année suivante, à l’invitation d’un ami, elle visite une église orthodoxe russe dans le quartier de Kanda, où elle rencontre le missionnaire Mgr Nicolas.

Yamashita rencontra Mgr Nicolas en 1875, lorsqu’elle commença à fréquenter l’école théologique pour femmes de la mission orthodoxe de Tokyo la jeune fille s’est sérieusement intéressée à la peinture d’icônes et l’archevêque Nicolas, la voyant « passionnée » pour la peinture d’icônes, à béni Yamashita Rin pour qu’elle aille faire un stage à Saint-Pétersbourg, au monastère de la Résurrection. A cette époque, Mgr Nicolas construisait  une église orthodoxe et avait besoin de ses propres peintres d’icônes. L’archevêque Nicolas a investi beaucoup d’efforts dans le développement de l’orthodoxie au Japon. Il a également traduit de nombreux textes religieux en japonais. Par la suite, en 1970, il fut canonisé en tant que  premier hiérarque de l’Église japonaise. Avec  la bénédiction de Nicolas, Yamashita se rendit à Saint-Pétersbourg.  Le voyage a duré trois mois.  Elle entre au couvent de Novodievitchi

Certes, la joie de poursuivre prochainement son activité préférée a été éclipsée par des maladies fréquentes dues au changement climatique, ainsi que par une mauvaise connaissance de la langue russe et des règles monastiques strictes. Cela entraîne une incompréhension totale, des omissions et du ressentiment. Elle était étrangère aux religieuses. Mais surtout, les fondements canoniques de la peinture à la détrempe à l’œuf lui étaient totalement incompréhensibles. Et il n’y avait personne à proximité qui pourrait lui expliquer les règles canoniques de la peinture d’icônes. Notant dans son journal sa tristesse devant la préférence de ses hôtes pour la peinture grecque plutôt qu’ italienne.  Yamashita Rin profite de son séjour pour étudier et copier des peintures occidentales exposées au Musée l’Ermitage. 

Les icônes avaient été créées avant la maturation des techniques artistiques, c’est pourquoi elle ne voulait pas les étudier. Elle était si naturellement douée qu’elle détestait les peintures mal exécutées. Malgré son russe limité, elle a protesté contre les religieuses qui lui enseignaient la peinture, avec une assurance totale en elle-même. Les femmes de l’époque Meiji avaient vraiment du caractère. Elle a donc naturellement été considérée comme une élève difficile. Finalement, le stress a affecté sa santé physique et elle est retournée au Japon, désespérée. Ses rapports avec les religieuses ont souvent été considérés comme conflictuels, mais je n’en suis pas si sûr, et je m’interroge aussi sur l’influence de la révolution russe. Avec la suppression des églises et des communautés religieuses, le couvent a dû faire face à des persécutions terribles. 

En 1883, elle retourne au Japon via Berlin  et Paris, arrivant à Yokohama en avril. Rin Yamashita forme alors un atelier dans un séminaire à Surugadai à Tokyo, sur des terres appartenant à la Cathédrale de la Résurrection de Tokyo, alors en construction. 

Après son retour au Japon, elle devient la première peintre d’icônes du pays, mais elle quitte l’Église orthodoxe, qui lui avait pourtant financé ses études à l’étranger. Puis très vite après, elle la rejoint à nouveau. À l’époque, il était difficile pour les femmes qui avaient étudié à l’étranger de se faire comprendre de la société, et presque impossible d’être indépendantes financièrement. Mais Yamashita Rin, une artiste talentueuse, a pu trouver du travail dans le Japon de l’ère Meiji en produisant des illustrations et des portraits pour des livres traduits, ainsi que des croquis pour des lithographies.

« Lorsque Rin a quitté l’église, il y avait des frictions entre le missionnaire Mgr Nicolas et les croyants de longue date au sujet de la construction d’une cathédrale à Kanda.  Ils l’ont exhorté à soutenir financièrement les églises locales qui aidaient des croyants vivant dans la misère, au lieu de consacrer d’énormes sommes à la construction d’une cathédrale. Sa confiance et son respect se sont approfondis pour Mgr Nicolas, qui avait appris à parler japonais avec un accent du Tôhoku (le nord-est du Japon) et qui insistait sur la nécessité pour les artistes japonais de produire des peintures d’icônes pour les croyants du pays.

« Il respectait les anciennes coutumes et expressions japonaises, ainsi que ‘l’esprit du peuple japonais’. Il n’a jamais nié la valeur du shintoïsme, du bouddhisme ou du confucianisme, s’efforçant à les étudier et les comprendre. Il n’y a pas eu d’autre Russe qui ait autant aimé les Japonais. Croire en l’existence de dieux dans la nature, comme les forêts ou le vent, est le point d’origine de toutes sortes de différentes croyances, et de telles croyances russes locales ont été absorbées par le christianisme orthodoxe. Nicolas a peut-être ressenti de la nostalgie en rencontrant des coutumes similaires au Japon. » Lien 

En 1905, son frère aîné meurt, suivi de sa mère trois ans plus tard. La Révolution russe 1917  cause une situation incertaine pour l’Église orhodoxe et interrompt les possibilités de soutien financier. En 1918, Rin Yamashita quitte Tokyo et retourne chez elle à Kasama, où elle vit pendant les trente années suivantes grâce à ses économies et aux quarante yens  qu’elle reçoit de l’Église chaque mois de juin et décembre. En 1937, son jeune frère meurt. Rin Yamashita, qui souffre de cataracte  depuis ses 62 ans, décède à l’âge de 81 ans le 26 janvier 1939.

ЯМАСИТА РИН (1857-1939) ЯПОНСКАЯ ИКОНОПИСИЦА – ДОЧЬ САМУРАЯ

« ЕСЛИ МНЕ ПРЕДНАЧЕРТАНО УМЕРЕТЬ, Я УМРУ. НО, ЕСЛИ МОЯ СУДЬБА- ЖИТЬ, Я БУДУ ЖИТЬ СВОЕЙ ЖИЗНЬЮ.»
                           

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